
Alfred Bernager
Alfred Bernager, né le 20 août 1914 à Paris, décédé le 6 juin 1999 à Larchant (Seine-et-Marne).
Le plus jeune frère de Léa Bernager, épouse du rabbin Apeloig et « directrice par intérim » de la colonie de l’OSC, a séjourné à Douelle à plusieurs reprises. Il n’a pas participé réellement à l’encadrement du groupe d’enfants réfugiés mais quelques éléments biographiques tirés d’une part de son témoignage auprès de l’USC Shoah Foundation Institute en 1996, et d’autre part de l’ouvrage de sa nièce Evelyne Pewzner-Apeloig (« À l'ombre de l'Absent », Libranova, 2024) enrichissent l’histoire de la maison dans le Lot de 1940 à 1943.
Jeune médecin interdit d'exercer
Né à l’orée de Première guerre, Alfred Bernager achève ses études de médecine quand se déclare la Seconde. Il est de fait mobilisé en 1939 comme cadre du service de santé. A sa démobilisation fin 1940, il est de passage à Douelle avant de gagner Marseille. Dans la cité phocéenne, il suit des cours de spécialisation et tente de se faire embaucher sur des navires assurant encore à cette date des liaisons avec l’Afrique (comme chargé de la sécurité sanitaire). Il n’y parvient guère qu’une fois. D’ailleurs, il ne peut plus exercer comme médecin en tant que tel. Les lois scélérates de Vichy sont passées par là.
Mais Alfred Bernager ne souhaite pas rester en retrait des événements.
Il est de retour à Douelle où on le retrouve comme chargé, en tant que civil, de participer à la surveillance « citoyenne » de la voie ferrée. Il est vrai que les actions de sabotage par la Résistance se multiplient au fil des ans. On doute toutefois que le jeune médecin proscrit ait accompli cette mission avec zèle quand on sait ce qui suit.
Un peu plus tard en effet, à l’automne 1942, il est arrêté à la frontière espagnole alors qu’il nourrit le dessein de rejoindre les forces alliées en Afrique du Nord. Emprisonné quelque temps, libéré sur caution (payée par les siens), on le retrouve de nouveau à Douelle.

Sauvé par un gendarme lotois
C’est là que va se produire un petit miracle.
Un soir, un gendarme se présente au domicile (de sa sœur ou de ses parents). Il demande à voir « le nommé Alfred Boulanger ». Ce dernier arrive et à sa grande stupéfaction le gendarme lui dit simplement : « Je suis venu vous dire que je reviendrai demain. » Sous-entendu : « Pas seul et pour vous embarquer... »
On ne saura jamais l’identité de ce gendarme ni les motifs de l’interpellation prévue. Etait-elle en lien avec sa tentative avortée de passer en Espagne ?
Toujours-est il que le jeune toubib a compris. Et il a bien des raisons de craindre le pire... Le soir-même, il fait ses bagages et gagne Châteauroux.
Grâce aux relations qu’y a nouées le rabbin Apeloig, après s’être caché quelque temps, Alfred Bernager rejoint bientôt un groupe de FFI dans un maquis de la région voisine, en Haute-Vienne. Il y est accueilli avec enthousiasme. En dépit de moyens matériels dérisoires, que des groupes armés de la résistance soient accompagnés d’un médecin est inespéré.
Il combat aussi en Indochine
A la Libération, Alfred Bernager s’engage dans l’Armée de la France libre et combat dans le nord-est du pays. Il rejoint ensuite la division Leclerc, toujours comme médecin, et s’embarque pour l’Indochine.
Alfred Bernager est de retour en métropole et à la vie civile en janvier 1949. Proche de son beau-frère, le rabbin Apeloig, avec lequel il a correspondu durant ses années en Asie, il l’encourage à se soigner et à prendre du recul. Ce que le rabbin fera. Mais trop tardivement sans doute.
Décoré pour son engagement dans la Résistance puis dans l’Armée, Alfred Bernager a épousé en 1952 la photographe Jacqueline Guattegno, connue pour ses portraits d’artistes et écrivains.