Trude Elkan

Trude Elkan, née à Spire (Allemagne) le 7 décembre 1928, décédée le 13 mars 2019 aux Etats-Unis.
Trude est expulsée d’Allemagne vers la France en octobre 1940 dans le cadre de l’opération Bürckel. Ses parents, Hugo et Bertha (dite aussi Lucie), étaient commerçants à Spire, dans le sud de la Rhénanie-Palatinat.
Après un voyage pénible de plusieurs jours, comme plusieurs milliers d’autres hommes, femmes et enfants juifs, la petite famille découvre avec effroi le camp de Gurs où les autorités de Vichy ont fini par diriger les trains.
Ce n’est que le début de l’enfer pour les parents de Trude, qui sont transférés ensuite à Rivesaltes. En août 1942, Hugo et Lucie sont « sélectionnés » pour être déportés. Le 11 août, un train les conduit à Drancy. Le 14, le couple fait partie du convoi n°19 en direction d’Auschwitz où ils sont assassinés dès leur arrivée. La grande majorité des victimes provenait des camps des Milles, de Récébédou, de Noé et de Rivesaltes. Mais ce convoi comprenait également 238 Juifs, déjà internés à Drancy, arrêtés lors de la rafle du Vel d’Hiv à la mi-juillet 1942.
Elle ne reverra pas ses parents
Ce convoi n° 19 présente enfin une dernière et affreuse spécificité : on y trouve de nombreuses familles dont 22 enfants. Et la première fois, des enfants de moins de 12 ans sont inclus.
Trude, heureusement, a été sauvée. Dès février 1941, elle a été exfiltrée par des Qakers (civils ou religieux protestants qui dès 1940 se sont organisés pour aider les réfugiés et internés).
Trude est d’abord placée à Aspet, que gère l’OSE, avec 47 autres enfants venant de Gurs, dont Marion Fernich. Après l’occupation de la zone dite libre, en novembre 1942, un nouveau danger menace. Le groupe est dispersé.

Trude est dirigée vers Moissac dans le centre géré par les Éclaireurs israélites. La maison d’accueil y est fermée en novembre 1943. À cette date, l’adolescente est déjà mentionnée à Espère.
On ignore son parcours précis jusqu’à la Libération. Est-elle de ces jeunes qui retrouvent quelque temps Moissac de l’automne 1944 au printemps 1945 ? Une photo conservée à l’US Holocaust Memorial le laisse à penser (ci-dessous).
Trude rejoint ensuite Paris (adresse mentionnée sur les documents d’émigration) et le 9 janvier 1947, elle émigre pour les États-Unis. C’est à Londres que son avion a décollé. Dans la liste des passagers, elle est notée comme ayant 18 ans, étudiante en confection, et ses papiers notent une adresse à Chicago.

Plusieurs membres de la famille Elkan originaires de Spire se sont installés dans cette ville de l’Illinois dès avant la guerre.
À Chicago, le 10 septembre 1948, elle épouse Peter Kuhn. Ce n’est sans doute pas un hasard... Né à Mannheim le 9 mai 1927, il fut également expulsé d’Allemagne puis interné à Gurs. Là, c’est l’OSE qui l’a exfiltré et il fut pensionnaire du centre d’accueil installé au château de Montintin, dans la Creuse. La suite de son itinéraire diffère : le 6 mai 1943, Peter trouve refuge en Suisse lors d’un passage dirigé par Georges Loinger. Il est arrivé aux États-Unis à l’été 1946. Entre-temps, ses parents ont été déportés à Auschwitz en août 1942 par le convoi n° 20.
Le couple s’installe peu après son mariage à New-York, et le 31 juillet 1951, Trude donne naissance à Rudy. Le 2 août 1954, un second fils vient égayer le foyer, Allen.
L'amour a triomphé
Sur son certificat de naturalisation, on lit que Trude, qu’il convient désormais d’appeler Trudy Kuhn, a des yeux bleus et des cheveux bruns.
Trude et Peter s’étaient-ils déjà connus à Gurs ou ont-ils découvert leur passé commun une fois installés en Amérique ? Nous l’ignorons.
La dernière adresse connue de Trude se situe dans le quartier du Queens. Il s’agit d’une maison de style traditionnel, élégante. Peter est décédé en août 2011. Trude, plus communément surnommée Trudy, s'éteint en 2019.