Nathan Berney
Nathan Berney, né le 18 septembre 1927 à Burgpreppach en Allemagne.
Nathan est le fils cadet d’Elias Berney, né en juillet 1884 et de Meta Traub, née en mars 1897. Il a un frère de trois ans son aîné, Léo, né le 18 octobre 1924. La famille réside à Burgpreppach, une petite ville de Bavière. Les deux garçons y fréquentent l’école juive de la localité qui compte donc une communauté israélite.
À l’instar de tous les foyers juifs de Burgpreppach, les Berney sont bouleversés par la nuit de Cristal, en novembre 1938. Dans un premier temps, Léo est envoyé chez une tante à Karlsruhe puis, fin décembre, les parents « placent » leurs deux fils chez une cousine de la maman vivant à Anvers.
C’est de Belgique que l’aîné, Léo, émigrera vers la Palestine encore sous mandat britannique. Etudiant d’abord dans une école agricole, Il s’y engage dans l’armée du Royaume-Uni en mai 1942. Après avoir combattu en Afrique du Nord, il participera aux campagnes de libération d’Italie, de France puis de Belgique et des Pays-Bas. Après la guerre, il retourne dans le nouvel état d’Israël, y fonde une famille, et sera agriculteur puis policier à Tel-Aviv.

Pour le reste de la petite famille, ces années de guerre se révèlent bien différentes, moins glorieuses mais plus douloureuses.
Fin 1938, le père est d’abord arrêté puis interné à Dachau.
En octobre 1940, libéré, il rejoint son épouse Meta et son fils cadet Nathan dans la Sarre d’où ils sont expulsés vers la France dans le cadre de l’opération Bürckel.
L'enfer du camp de Gurs
Nathan qui témoignera bien plus tard auprès de l’US Memorial évoquera cet exil (*) : « Les conditions de transport étaient éprouvantes mais je me souviens qu’à un moment, un des voyageurs a pu apercevoir les noms de certaines gares. Il a compris que nous traversions l’Alsace et que l’on se dirigeait vers la France. L’optimisme nous gagna... »
Ce parfum d’euphorie fut de courte durée. Comme des milliers de leurs compatriotes, les Berney finissent par être internés au camp de Gurs.
L’hiver 40-41 est terrible. Au mois de février, le père Elias qui est tombé malade est admis dans une unité sanitaire et décède le 26 (à Gurs même ou à Pau, selon les sources).
A cette même période, Nathan est exfiltré de Gurs avec l’accord des autorités et avec un groupe d’enfants, il est dans un premier temps pris en charge à Aspet.
Par la suite, le désormais adolescent gagne Marseille et aurait séjourné à l’Hôtel du Terminus des Ports.
C’est là selon toute vraisemblance qu’il intègre le groupe de jeunes que dirige le rabbin Zalman Shneerson. Alors que la situation devient dangereuse à Marseille, Nathan fait donc partie de « la colonie » que le rabbin installe à Dému, dans le Gers, au château de Seignebon, en novembre 1942.
Direction l'Isère via Espère ?
Inquiété par des « rondes » de gendarmerie, le rabbin décide de quitter les lieux à compter du 23 mars 1943. Par petits groupes, les jeunes doivent rallier l’Isère (alors sous contrôle italien). Le rabbin a trouvé un premier point de chute à Grenoble et Voiron.
Ils empruntent le réseau ferroviaire secondaire, moins surveillé par l’occupant allemand et la police française. Sur le trajet, avec d’autres, Nathan Berney a pu faire étape à Espère. Il est mentionné comme ayant été quelque temps « pensionnaire » de la maison de l’OSE sur la liste publiée dans le livre de Katy Hazan et Serge Klarsfeld.
Le 8 février 1944, le Consulat Général de la République du Salvador accorde la nationalité salvadorienne à Nathan Berney lui permettant de franchir officiellement la frontière suisse pour y trouver refuge. Il est alors domicilié dans une maison du Rabbin Shneerson, il ne fera pas usage (l'a-t-il seulement reçu ?) de ce sauf-conduit signé par G. Mantello que la République du Salvador a distribué par centaines à des enfants et des adolescents.

En mars 1944, alors que sa mère Meta a rejoint également le groupe du rabbin, lequel a dispersé ses protégés dans différentes fermes, Nathan échappe de peu à une descente de la gendarmerie (**). Durant les mois qui précèdent la Libération, Nathan Berney, qui n’a pas encore 17 ans, aide la résistance.
Avec sa mère, il embarque de Marseille pour New-York le 24 août 1946.
En 2010, avec d’autres survivants de la Shoah établis aux États-Unis, Nathan Berney effectue un voyage en France et fait notamment étape dans le Gers.
Selon nos infirmations, il est toujours en vie et installé à Lakewood, dans le New-Jersey.
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(*) Dans cet entretien, Nathan Berney ne mentionne pas Espère où il n’aurait séjourné que quelques jours.
(**) « Le 17 mars, le rabbin Chneerson et ses protégés de La Manche connaissent une première alerte. Les gendarmes de la commune voisine, Moirans, débarquent dans la maison louée à M. Jacolin. Six jeunes juifs s’enferment aussitôt dans la cave, de peur d’être réquisitionnés pour le service du travail obligatoire (STO). Les gendarmes fouillent les lieux pendant cinq heures, sans les trouver. Mais ils cherchent aussi de l’argent, car le bruit court que le rabbin cache une fortune ! « De l’or dans un seau à merde », prétend la rumeur. À défaut de trésor, les pandores découvrent trois personnes - l’enfant Nathan Berney, sa mère, et Mme Chneerson -, auxquels ils dressent un simple procès-verbal pour non déclaration de domicile. » Dans « Voiron, la rafle oubliée », article de Philippe Broussard, journal Le Monde, 2 décembre 1997.