Les enfants Strauss

Mirjam Strauss, née le 15 mai 1927 à Hambourg (Allemagne)

Mirjam Strauss, décembre 1943. Archives fédérales suisses.

Eva Strauss, née le 27 juillet 1929 à Hambourg (Allemagne)

Eva Strauss, décembre 1943. Archives fédérales suisses.

Jacob-Ludwig Strauss, né le 3 décembre 1932 à Hambourg (Allemagne), décédé en 2017, à Jérusalem (Israël).

Jacob-Ludwig Strauss, 1943. Archives fédérales suisses.

Ces trois enfants auraient séjourné à Espère, figurant dans la liste publiée par Katy Hazan dans son ouvrage consacré aux maisons de l’OSÉ. Ce ne fut au mieux qu’une courte étape entre le centre ouvert à Dému (Gers) par le rabbin Schneersohn à l’automne 1942 et qu’il ferma fin mars 1943, ayant trouvé un refuge à Voiron à compter d’avril, que ses pensionnaires gagnèrent via des lignes secondaires, par petits groupes.

L’essentiel des informations dont nous pouvons faire état provient du dossier d’immigration conservé par les Archives fédérales suisses.

Les premiers à avoir franchi la frontière sont les parents. Il s’agit de Félix Strauss (né le 30 juin 1883 à Francfort) et son épouse Bertha (née Caro en 1895). Auditionné par la police, il déclare :«  Je suis né à Francfort où mon père était banquier. J’ai suivi des études primaires et secondaires dans cette ville jusqu'à l’âge de 16 ans. A l’âge de 38 ans, je me suis marié à Hambourg avec Bertha Caro. J’ai toujours travaillé par la suite comme négociant dans diverses villes d'Europe. En 1934, j’ai élu domicile avec ma femme et mes enfants à Anvers, où je suis resté jusqu’au 10 mai 1940. A cette date, j’ai été arrêté par les autorités d'occupation et conduit dans un camp de concentration en France. Sitôt ma libération obtenue, je suis parti avec ma femme à Saint-Gervais. Et je me suis décidé à chercher refuge en Suisse. Le 15 août 1943, j’ai pris le train pour Evian et de cette ville, avec ma femme, nous avons traversé le lac Leman en barque pour Allaman dans le canton de Vaud. »

Les enfants rejoignent leurs parents

Ce sont ensuite Eva et Jacob qui sont interceptés par la police juste après avoir passé la frontière le 13 septembre.

Enfin, quelques jours, plus tard, leurs filles Fanny (née le 11 mars 1925 à Hambourg) et Mirjam passent la frontière à leur tour. Dans sa déposition le 18 septembre 1943, l’aînée explique, après avoir décliné son identité : « Je suis apatride, juive, surveillante d’enfants, célibataire, domiciliée à Anvers… J’ai habité l’Allemagne jusqu’en 1934, ainsi que ma sœur, puis jusqu’en 1941 en Belgique, puis en France. Nous étions jusqu’en 1940 avec mes parents, mon père étant commerçant. Je suis venue en Suisse n’ayant plus personne en France, puisque mes parents et frère y sont déjà. J’ai franchi la frontière le 17 septembre 1943, avec ma sœur Mirjam, des enfants et M. Siegfried Rothschild, sorti d’un camp d’internement en France il y a un mois. C’est un ami de mes parents. Nous sommes réfugiées en Suisse pour éviter les mesures prises par les troupes d’occupation allemandes. » Dans un document annexe, la jeune Fanny, toujours, 18 ans, mais qui fait montre d’une grande maturité, ajoute quelques précisions. Elle est entrée en France en avril 1941, et fut internée au camp de Gurs de mai à juillet 1941, date à laquelle elle fut libérée car possédant un visa pour les USA. Par la suite, elle a occupé la fonction de surveillante d’enfants à Dému (Gers) et Voiron (Isère). Deux centres dirigés par le rabbin Schneersohn qui se voue à la sauvegarde des enfants juifs menacés (et parfois de leurs parents), et qui avait commencé son itinéraire en France au Broût-Vernet (Allier) puis à Marseille de février 1941 à l’automne 1942.

Le rôle clé du rabbin Schneersohn

A noter qu’elle précise alors qu’à cette date, son frère aîné Walter Strauss (né le 20 septembre 1922) est déjà établi à New-York et Martin (né le 18 octobre 1923) serait encore en France en Savoie. Pour ce qui le concerne, on ignore à quelle date il a rejoint sa famille…

Une fois réunie (hors l’aîné déjà exilé aux États-Unis), la famille va être assignée à résidence dans différents camps ou institutions. Elle doit son salut en France occupée à l'action du rabbin Schneersohn mais aussi, si l'on s'en tient aux documents conservés en Suisse, pour la suite, à un soutien financier de leurs parents ou amis pour obtenir les visas et envisager leur avenir sereinement.

Il semble qu’en 1945, parents et enfants auraient d’abord gagné l’Angleterre. Cependant, au fil des années, une partie de la fratrie aurait choisi de partir s’établir en Israël.

Sources : Archives fédérales suisses, site généalogique Geni.